CHAPITRE
20 : Nouvelles du continent
Amara
était assise sur le matelas, elle s'ennuyait. Elle aurait
aimé sortir, ne voir que ces parois de bois et cette obscurité
était plutôt déprimant.
Soudain Amara entendit des pas dans la pièce à côté,
au même moment son bracelet se mit à scintiller.
Il ne brillait pas très fort mais son éclat était
accentué par le peu de lumière qui régnait
dans la pièce.
Quelques instants plus tard, la porte s'ouvrit. ShadowTony entra,
suivi d'un homme qu'Amara ne connaissait pas. Elle se leva.
- Bonjour.
- Salut, je m'appelle Lay.
- Plus tard les présentations, nous avons quelque chose
de plus important à faire.
Il posa le tofu dans les bras d'Amara.
- Asseyons nous.
ShadowTony et Amara prirent place sur le matelas. Lay s'assit
devant eux, le dos appuyé à la porte.
- Quelqu'un du continent m'a envoyé un message. Et ce doit
être la personne qui a reçu mon tofu.
Amara sourit.
ShadowTony déroula le parchemin.
- Il n'y a rien dessus, remarqua Amara.
ShadowTony fixa le parchemin quelques secondes, de minces lettres
rouges orangées apparurent.
Lay s'approcha pour lire par-dessus leur épaule.
- Il n'y a toujours rien.
- C'est normal, tu ne peux pas le lire. Ecoute plutôt.
Le Sadida retourna docilement s'asseoir, ShadowTony commença
à lire.
Je
ne vous connais pas mais je vous remercie de vos renseignements.
Actuellement, une équipe de jeunes gens du berceau sont
en route vers le camp des Chevaliers de la Terre afin de ramener
quelques volontaires jusqu'ici. J'aimerai avoir d'avantages de
renseignements sur les démons qui gardent Amara, ainsi
que sur la position de votre bateau.
J'aimerai aussi m'assurer que vous dites vrai et qu'Amara est
avec vous en bonne santé.
Nous vous tiendrons au courant, normalement nous viendrons récupérer
votre prisonnière dans moins d'une semaine. Tenez vous
prêts.
En espérant ne pas me tromper en vous accordant toute ma
confiance, je vous prie de prendre bien soin d'Amara durant ces
quelques jours.
M.
Tsongor
Le 06/08/05 au berceau de l'oiseau des flammes
Le
visage d'Amara affichait un sourire rayonnant. Non seulement il
était sûr à présent que quelqu'un viendrait
la chercher, mais elle avait ici une preuve que ShadowTony ne
lui avait jamais menti.
ShadowTony aussi semblait content de ce courrier, ou plutôt
soulagé.
- Merci Lay, il n'aurait pas fallu que cela tombe entre les mains
du chef.
Mais Lay semblait sceptique.
- Je ne comprends pas.
- C'est pourtant simple. Les amis d'Amara vont venir la chercher,
je leur ai donné toutes les informations pour qu'ils nous
trouvent et puissent récupérer Amara sans danger.
- Mais pourquoi ? Et ton père ?
- Réfléchis. Entre une petite sur adorable,
qui ne ferait pas de mal à une mouche, et un roi cruel
et sans cur, qu'est-ce que tu choisirais ?
- Evidemment, vu comme ça
- Ecoute, quand ils auront récupéré Amara,
je partirai. Est-ce que tu viendras avec moi ?
- Tu songerais à me laisser tout seul ici avec ces gens
là ?
- Bien sûr que non, répondit ShadowTony avec un sourire.
Amara,
elle, relisait la lettre de Maître Tsongor.
- Il parle de venir d'ici une semaine, vous croyez que les démons
se doutent de quelque chose ?
- Ca m'étonnerait beaucoup.
- Je me demande où nous irons, après.
Les trois jeunes gens discutèrent un moment puis Lay repartit
aux cuisines.
- Je verrai cet après-midi s'il est possible de te laisser
aller sur le pont. Tu as faim ? Demanda ShadowTony.
- Merci, pas pour l'instant, répondit-elle.
- Bon, je vais aller voir ce qu'il se passe dehors. Nous répondrons
à cette lettre cet après-midi. A tout à l'heure.
- A tout à l'heure, lui répondit-elle en souriant.
Il sortit et referma la porte derrière lui, à nouveau
la lumière, au poignet d'Amara, diminua peu à peu.
Le
soleil, haut dans le ciel, réchauffait fortement la température.
Ses reflets dans le sable clair éblouissaient les huit
compagnons. Ils discutaient gaiement, leur marche rythmée
par le bruit des vagues.
Il était déjà plus de midi et ils n'avaient
fait que de courtes pauses durant la matinée, mais personne
ne se plaignait, le temps était magnifique, de même
que le paysage autour d'eux. Loulou regardait autour d'elle silencieusement.
Keazou regrettait un peu les bavardages de son amie qui parlait
beaucoup d'ordinaire. Elle ne parlait guère mais n'arborait
plus cet air triste qui se lisait sur son visage depuis quelques
jours.
Le soleil d'été faisait briller ses longs cheveux
et sa peau déjà hâlée par le soleil.
Keazou l'admirait en marchant à quelques pas derrière
elle. Ses vêtements d'été courts, mettaient
son corps en valeur. A ce moment là il ne put s'empêcher
de repenser au jour où il avait été sauvé
sur la plage. Il se rappela avoir eu à la fois un regard
sur son amie dans son petit bikini rouge vif et un regard sur
la douce jeune fille qui se tenait derrière elle, frissonnant
dans son simple maillot de bain bleu azur. Son air timide et enfantin
lui avait plu. De la même façon que Loulou, la jolie
jeune femme au visage rieur et au tempérament de feu lui
plaisait. Les deux jeunes filles étaient totalement différentes
mais elles se complétaient et avaient toutes les deux leur
charme. Loulou le savait et ne s'en cachait guère. Amara,
elle, avait un charme naturel dont elle ne se rendait pas compte,
c'est ce qu'aimait Keazou chez elle.
A cette pensée, Keazou se trouva un peu bête. Il
n'avait vu Amara qu'une ou deux fois et ne lui avait jamais parlé.
Il la trouvait très jolie, mais rien de plus. Du moins
c'est ce qu'il s'efforçait de penser.
En
revanche, son amie, Loulou marchait juste devant lui. Ses longues
ailes noires scintillaient au soleil, des reflets bleu nuit les
parcouraient. Il la rejoignit, c'est elle qui était à
la tête du groupe. Il posa sa main sur son épaule
tout en faisant stopper le groupe.
- On va s'arrêter là, Loulou.
Il lui montra un endroit à l'ombre, plus haut sur la plage,
en bordure de la petite forêt qui longeait la plage. Ils
allèrent s'asseoir à l'ombre dans le sable. Il était
13h environ.
- Le voyage est très calme, commenta Dark en commençant
à manger.
- Calme ? Tu trouves ça calme de se faire attaquer par
un énorme Meulou ? Répliqua War.
- Oh
bof.
A ce moment Beothien se leva, coupant court à la discussion.
Devant le regard interrogateur des autres, il dit d'un air rieur
:
- Je vais là où vous ne pouvez pas aller pour moi.
- Okay, fais attention, ne t'éloigne pas trop. Lui recommanda
Keazou.
- Oui Maman.
Beothien partit, s'enfonçant dans la forêt derrière
eux.
" Décidément très étrange ce
Beo ", se dit Keazou.
Oubliant l'incident, ils se remirent à manger.
xxx
Beothien marchait dans la petite forêt, regardant partout
autour de lui. Soudain une voix féminine l'interpella.
- Attention Stradivarius. Ne bouge pas !
Le jeune homme s'arrêta net. Regardant toujours autour de
lui. Quelques instants plus tard, une forme se dessina entre les
branches d'un petit arbre, devant lui.
Une jeune femme d'une grande beauté venait d'apparaître.
Elle portait des vêtements courts, de cuir rouge. Un long
manteau de cuir noir recouvrait son dos et ses épaules,
elle portait de grandes bottes de cuir souple totalement noir.
Un voile de tissus noir cachait ses cheveux et le bas de son visage,
deux fines dagues étaient accrochées à sa
ceinture.
- Ah ! Xellia, tu es là.
Il voulut s'approcher d'elle.
- Ne bouge pas !
- Mais
- Recule Stradivarius.
Il leva les yeux vers elle, elle souriant. Beothien, rassuré,
recula de quelques pas.
La jeune femme lança agilement l'une de ses dagues devant
l'endroit où se tenait précédemment Beothien.
Une petite explosion silencieuse produit un halot jaune qui souffla
toute chose autour de lui. Les feuilles et petites branches furent
projetées plus loin, les objets plus gros étaient
légèrement déplacés, d'autres comme
les grosses pierres se fissuraient.
- Un piège. Pourquoi ?
- Au cas où.
Beothien s'approcha de la jeune femme et l'embrassa. Ils s'enlacèrent
et Beothien chuchota :
- Tu as été très discrète. C'est bien.
Personne ne t'a vue ?
- La fée m'a aperçue, mais le Milimulou a détourné
l'attention.
- Ca va devenir difficile maintenant, la forêt laissera
bientôt place aux champs.
- Oui je sais
Je devrai rester plus loin.
- Non, c'est trop risqué. Je veux que tu partes devant.
Nous allons au village des Tofus Perdus. Essaye de prendre de
l'avance et de nous y attendre.
- Entendu Stradivarius.
- Pars maintenant, tu avanceras plus vite que nous. Sois prudente.
Il l'embrassa à nouveau et la regarda partir. Sa silhouette
s'effaça peu à peu. Ce mode de " camouflage
" était propre aux Serpents de l'Air.
Beothien s'empressa de rejoindre les autres sur la plage.
xxx
Le groupe finissait de manger, on ne prêta guère
attention au retour de Beothien.
Ils repartirent un moment après. Keazou demanda :
- Vous êtes prêts ? L'après-midi va être
long et la nuit tombée, nous dresserons notre camp sur
la plage.
Ils discutaient tout en marchant.
- Il faudra faire des tours de garde cette nuit, remarqua Drou.
- Oui, mais nous sommes huit, nous pourrons facilement nous partager
la tâche.
Aucun
incident ne survint durant l'après-midi, le groupe s'arrêta
dès que le jour commença à baisser.
Peu
de temps après midi, Amara entendit quelqu'un venir, son
bracelet se remit à luire.
Quand ShadowTony entra, elle montra le bracelet et dit sur un
léger ton ironique :
- C'est pratique ce truc.
ShadowTony était content, la voir sourire de cette façon,
heureuse de savoir qu'elle allait bientôt quitter cet endroit,
oubliant un instant Misugi, lui faisait plaisir.
Il vint s'asseoir tout près d'Amara.
- Nous allons répondre à la lettre, d'accord ?
- Oui, d'accord.
Il sortit un rouleau de parchemin, une petite plume de Corbac
et une bouteille d'encre de l'intérieur de son manteau.
- Hum
Attends une seconde.
Le jeune homme se leva et sortit. Il revint quelques minutes plus
tard, traînant une grosse caisse qui semblait vide. Il la
posa devant eux.
- Voilà.
Il revint s'asseoir près d'elle et commença à
écrire.
Nous
avons bien reçu votre message, Amara est juste à
côté de moi.
Actuellement, nous nous trouvons au Sud-Ouest de l'Ile des Wabbits.
Dans une semaine exactement, nous serons bien à l'est d'ici,
quelque part entre cette île et l'Ile de Moon. Vous n'aurez
aucune difficulté à nous repérer si ce temps
perdure.
Sur ce bateau, quatorze démons sont présents, en
comptant mon ami et moi qui sommes de votre côté.
Notre chef est puissant. C'est un archer, maître du feu,
mais il est très rapide. Il vise bien.
Notre équipe est malheureusement très bien constituée
: deux fées, deux Sadidas, deux Maîtres des Boucliers,
trois Maîtres de la Terre, un Maître des Eaux et un
Maître du Temps.
Tous ont un très bon enseignement en matière de
magie noire et tuent sans regrets.
Quant à nous, il y a un Sadida et moi-même, Maître
du Feu. J'ai avec moi mon Dragonnet et mon Craqueleur ainsi que
ce Tofu voyageur.
Je pense qu'il vous faudra une équipe semblable et légèrement
plus nombreuse pour venir à bout des démons. L'effet
de surprise sera votre meilleur atout.
Je laisse Amara finir cette lettre, ce qui pourra vous assurer
de sa présence, en bonne santé, à bord du
bateau.
Amicalement
ShadowTony
-
Voilà, dit-il à Amara qui se tenait alors contre
lui et lisait par-dessus son épaule. Est-ce que ça
te convient ?
- C'est parfait. Que sont les îles dont tu parles ?
- Ces deux îles sont liées l'une à l'autre.
Un jour, les deux rois de ces îles, Moon et le Wa se sont
disputé a cause d'un objet magique qu'ils avaient trouvé.
C'était il y a très longtemps. Lors de leur dispute,
chacun des rois a utilisé cet objet magique contre l'autre
île. Le peuple du Wa a été totalement transformé.
Le sort a transformé chaque individu en créature
étrange, entre l'homme et une espèce de lapin
difficile à décrire sans l'avoir vu. Le peuple de
Moon quant à lui a subit une toute autre transformation.
Chaque personne a en fait été changée en
ce qui se trouvait près d'elle. On trouve par exemple des
hommes cocotiers, des buissons vivants et des plantes gélatineuses
vivantes. Ou bien encore des squelettes qui se trouvaient là
par hasard. Moon et sa garde ont été transformé
en singes. Depuis toutes ces années, les deux peuples sont
condamnés à ne jamais changer de forme, ni d'âge.
Ils sont totalement pacifiques mais si on les tue, ils réapparaissent
quelques jours plus tard. C'est là leur malédiction.
Amara ne répondit rien, cette histoire lui paraissait invraisemblable,
pourtant plus rien n'étonnait la jeune fille.
- J'aimerai les voir, un jour.
ShadowTony
lui sourit et passa le bras autour de ses épaules.
- Autre chose, pourquoi parles-tu de " Maîtres "
?
- Oh
c'est vrai, tu ne connais rien du monde des démons.
Vous, vous avez des " ordres " et ces ordres ont des
noms. Nous, nos ordres n'ont pour nom que leur élément
et ceux qui en suivent l'enseignement sont appelés par
leur rang : Maître, Novices, Apprentis. C'est ce qui permet
de connaître notre niveau, alors que vous parlez plutôt
en nombre d'années passées au berceau. Tu comprends
?
- Oui je comprends. Mais dans ce cas
Les Sadida, les Maîtres
des Boucliers et du Temps ? Ils ne font pas partie des quatre
éléments. Qui sont-ils ?
- Oh
Je vais t'expliquer.
Amara rougit légèrement.
- Désolée, je ne connais la magie que depuis peu
de temps
- C'est normal, ne t'en fais pas. Ces personnes font partie des
ordres que tu connais. Pour vous, il y a l'Ordre du Temps et les
Créateurs de Boucliers. Les Sadida sont les gens comme
Lay, mon ami que tu as vu tout à l'heure.
Il lui conta la légende des Sadida.
- Les Créateurs de Boucliers font partie de l'Ordre du
Feu, ils reçoivent leur enseignement avec vous. L'Ordre
du Temps est constitué d'une minorité d'êtres
très étranges. Ils sont très petits et ont
l'apparence de jeunes adultes, mais certains d'entre eux ont plus
de trois cents ans ! Pour les Sadida, nous les appelons aussi
Maîtres des Plantes. S'il y a des plantes où ronces
dans les parages, ils peuvent en faire ce qu'ils veulent. S'il
n'y en a pas, aucun problème : ils en font apparaître.
Ils le peuvent même avec de petits arbres et buissons. Par
ailleurs, dans leur clan, on créait d'étranges poupées
de tissus qu'ils pouvaient animer. Certaines utilisent de puissants
sortilèges tout de même, ces poupées possèdent
un dixième de la puissance de leurs créateurs au
niveau de leurs pouvoirs. Certaines par exemple, utilisent des
sorts de soin ou de puissantes attaques.
- Je n'en avais jamais entendu parler. Merci.
- Tu finis la lettre ? Les gens du berceau l'auront d'ici quelques
heures.
- D'accord.
Elle prit la plume et commença à écrire à
la suite de la lettre de ShadowTony. Cette fois-ci c'était
lui qui était appuyé contre elle et lisait ce qu'elle
écrivait.
- Qu'est-ce que je dois écrire, au fait ?
- Tout ce que tu veux, nous avons le temps.
- Bon
Chers
amis du berceau,
Nous
venons de recevoir votre lettre, je vous remercie de vous inquiéter
pour moi. Il est vrai que mes débuts ont été
très difficiles à bord de ce bateau. Heureusement
que ShadowTony était là.
J'étais malade quand je suis arrivée ici, je faisais
aussi beaucoup de cauchemars. Ma tête était si douloureuse
que les vertiges m'empêchaient de marcher. Je ne comprends
pas ce qui s'est passé pour que j'aille si mal. Peut-être
ai-je été empoisonnée ?
J'étais dans une petite cabine de bois glacée et
humide, sur un matelas. Je n'ai pas pu manger pendant plusieurs
jours. Puis ShadowTony est arrivé et m'a apporté
à boire et à manger. Il m'a rendu ma cape. Aujourd'hui,
je ne suis plus malade. Je me suis rétabli peu à
peu, mais je m'ennuie beaucoup quand mon frère n'est pas
là. Car ShadowTony est mon frère, mon père
est le roi des démons, à Brakmar. ShadowTony m'a
raconté beaucoup de choses et a répondu a mes questions,
je m'ennuie moins quand je discute avec lui. J'aimerai sortir
et regarder la mer, j'en ai marre d'être enfermée
dans le noir.
A ce propos, il s'est passé quelque chose d'étrange
hier, quand ShadowTony m'a touché le bras, je me suis endormie.
Il parait que quand je dormais mon bracelet s'est mis à
briller très fort. A chaque fois que ShadowTony s'approche
de l'endroit où je suis, mon bracelet se remet à
scintiller. Les oiseaux sont devenus rouges, celui de son médaillon
comme celui de mon bracelet. Pourquoi ?
Voilà, j'attends votre venue avec impatience, je vous souhaite
bonne chance, surtout à ceux qui sont partis chercher de
l'aide.
A
très bientôt, je l'espère
Amara
-
C'est parfait, dit ShadowTony avec un sourire. Regarde, maintenant.
Le jeune homme se concentra un instant, puis les minces lettres
s'effacèrent.
- C'est un procédé peu connu, les prêtres
et les personnes importantes le maîtrisent, j'ai la chance
que mon père soit roi et me l'ait appris.
Il roula le parchemin et l'accrocha à la patte du gros
tofu.
- Il n'en a pas l'air, mais c'est un facteur très efficace.
Il n'a qu'à gonfler ses plumes et battre un petit peu des
ailes et il s'envole tout doucement dans les airs. Lay est sur
le pont, je peux lui demander de " te surveiller " si
tu veux sortir.
- Oui j'aimerai bien, c'est possible ?
- On va voir ça, viens.
Ils se levèrent. Il la prit fermement par le bras.
- Excuse-moi, mais ce serait bête que les démons
se doutent de quelque chose maintenant ! Lay devra peut-être
t'attacher pour " faire en sorte que tu ne te sauves pas
" mais il fera attention à ce que ça ne te
gêne pas, tu es d'accord ?
- D'accord.
Ils
sortirent tous deux sur le pont, Lay était assis sur un
tonneau, au milieu du bateau.
ShadowTony la " traîna " jusqu'à lui, elle
le suivit docilement.
Il dit d'une voix forte :
- Surveille bien Amara, je vais fouiller sa chambre, qui sait
ce qu'elle aurait pu y cacher. De toute façon un peu de
vent froid lui fera le plus grand bien.
Un démon s'approcha :
- N'avez-vous pas peur qu'elle utilise la magie pour se sauver
?
- Non, elle est encore trop faible pour ça. Et puis où
voudrais-tu qu'elle aille ? Ne t'inquiètes pas. Ils resteront
dans un coin pour que vous n'ayez pas peur
Les démons restaient tout de même loin du petit groupe,
celui qui avait parlé s'éloigna.
- Bon, Lay ça ne te dérange pas ? Chuchota-t-il.
- Non pas du tout.
- Si tu l'attaches, vas-y doucement s'il te plait.
- Pas de problèmes.
- Allez là-bas.
Il montra l'avant du bateau.
- OK, t'inquiètes pas.
- Et toi ? Où tu vas ? Demanda Amara à voix basse.
- Je dois d'abord envoyer le Tofu, puis je dois écrire
à mon père pour lui dire qu'aucun incident ne va
perturber nos plans. Soyez prudents.
ShadowTony
s'éloigna et retourna à sa cabine, non loin de celle
d'Amara.
Lay prit à son tour le bras d'Amara et l'emmena à
l'endroit indiqué par ShadowTony. Ils montèrent
quelques marches. Ici les bords du bateau étaient surmontés
d'une balustrade de bois. Ils s'en approchèrent et s'assirent,
leurs jambes pendant dans le vide au dessus de la mer. La balustrade
les mettait en sécurité en les empêchant de
tomber par-dessus bord.
- Bon, je vais devoir t'attacher. Tu me dis si ça te gène.
Mets tes mains comme ça.
Il lui positionna les deux mains à plat l'une contre l'autre.
Il se concentra un instant et de fines plantes aux douces feuilles
s'enroulèrent autour des poignets de la jeune fille.
Une sensation bizarre l'envahit, elle se sentait très bien
mais une idée s'imposait à son esprit : elle e pouvait
pas bouger.
En effet, elle essaya de remuer ses jambes, celles-ci bougèrent
faiblement, elle n'aurait pu marcher. Pareil pour ses bras.
- C'est bizarre au début, hein ?
- Oui, mais ça va.
- Les effets de cette plante sont très étranges.
Amara
regarda autour d'elle, au moins elle pouvait tourner la tête.
Aucune île n'était en vue, comme la première
fois qu'elle était sortie. Le vent avait faibli, il faisait
beaucoup moins froid. Le soleil brillait et le ciel était
d'un bleu magnifique.
Elle ne savait pas quoi dire à Lay, il n'était pas
bavard. En l'observant, elle vit qu'il regardait la mer d'un air
triste. A cet instant, Amara pensa qu'il avait l'air très
malheureux. Les yeux humides et brillants, il avait la tête
appuyée contre la balustrade. Amara en eût le cur
serré. Elle aurait aimé le réconforter mais
ne savait pas comment s'y prendre, lui demander ce qu'il avait
aurait été indiscret.
Lay
soupira à côté d'elle, il ne semblait pas
décidé à parler. Amara regarda la mer à
son tour, ne voir que de l'eau à perte de vue était
impressionnant, le bateau n'allait pas très vite, la mer
était très calme.
Elle tourna la tête vers Lay qui lui dit :
- Pourquoi as-tu l'air si heureuse Amara ?
- Je ne suis pas heureuse. Simplement optimiste. Je suppose que
tu sais ce qu'ils ont fait
au cimetière
Sa voix tremblait légèrement, elle luttait pour
ne pas pleurer, troublée par l'attitude du jeune homme
et la pensée de Misugi.
- Oui je le sais
C'est pourquoi je t'ai posé cette
question
Je ne sais pas comment tu peux encore arriver à
sourire.
- Evidemment c'est dur
Je souffre beaucoup.
Des larmes perlèrent malgré elle aux coins de ses
yeux.
- Mais je me dis que la vie continue
au début sur
le bateau j'étais totalement désespérée,
perdue ? Mais c'est parce que je croyais que je ne m'en sortirais
pas, j'étais seule ici, on allait me livrer à des
démons encore plus cruels que ceux qui m'ont enlevée,
ceux qui ont
Elle étouffa un sanglot, depuis qu'elle avait commencé
à parler, les larmes coulaient sur ses joues sans qu'elle
puisse les retenir.
- Tu comprends ? Maintenant il y a quelqu'un qui m'aide, quelqu'un
a qui j'ai pu parler et me confier. Je sais que ShadowTony ne
remplacera jamais Misugi, mais on ne peut pas revenir en arrière,
et je sais que je vais devoir continuer à vivre sans lui,
et qu'il faut que je surmonte ma douleur. Je ne veux pas baisser
les bras.
- Tu es courageuse
- Je ne sais pas
mais tout ce que je veux c'est vivre ma
vie. Normalement. Je ne sais pas si je pourrais être "
courageuse " si je perdais d'autres personnes qui me sont
chères
Mais pour l'instant je veux continuer à
avancer.
- Oui tu as raison
mais ce n'est pas facile, il faut beaucoup
de volonté
- Qu'est-ce qui t'es arrivé ?
- C'est les démons
dans le quartier où j'habitais,
à Brakmar. Ils ont enlevé toutes les femmes et en
ont fait des démones
Au début personne ne
le savait, mon amie était parmi elles. Au début,
tout allait bien, puis elle a commencé à sortir
la nuit, à me cacher des choses. Je souffrais énormément
de son attitude, j'ai essayé de lui parler. Elle m'a simplement
dit " c'est pour ton bien, tu verras ". Je l'ai crue
aveuglément. C'est quand je l'ai vue tuer que j'ai compris
ce qu'ils avaient fait. Je l'ai suivie une nuit et j'ai vu ce
qu'elle faisait, avec les autres démones
Je l'ai
vu tuer des hommes, des femmes, des enfants
Elle n'était
plus elle-même. Et ils l'employaient pour me rendre comme
eux, j'ai du m'enfuir sur ce bateau, tout laisser pour fuir la
femme que j'aimais, car je savais que je finirais par leur céder
Je regrette de l'avoir laissée, de ne pas m'être
battu
Il
reprit après un court moment de silence.
- Mais je ne veux pas t'ennuyer avec mes histoires, tu ne peux
rien y faire de toutes façons.
- Désolée, mais tes histoires m'ennuient moins que
le silence. Peut-être que je ne peux rien arranger, mais
ça fait du bien de parler. Est-ce que tu en as déjà
discuté avec quelqu'un ?
- ShadowTony mon seul ami est très occupé en ce
moment
- Quand les secours viendront, vous passerez beaucoup de temps
ensemble. Il m'a parlé de missions qu'il devait effectuer.
- Oui, je le suivrai.
- Le sortilège qui emprisonne les démons ensorcelés
par le Maître sera brisé quand nous aurons déjoué
ses plans. Tout redeviendra comme avant. En tout cas je me battrai
pour ça ! Si nous nous unissons tous, nous pourrons vaincre
le mal, tu es d'accord avec moi ?
- Oui, bien sûr.
- Tu dois aussi te battre
imagine quand tout sera fini,
tu rentreras chez toi, tu retrouveras ta compagne
C'est
ce que tout le monde veut.
- Oui, tu as raison Amara.
Ils
se remirent à regarder la mer silencieusement, réfléchissant.
Ils passèrent un long moment ainsi ? L'après-midi
était déjà bien avancée quand ShadowTony
les rejoignit. Il vint s'asseoir entre eux deux.
- Voilà. Mission accomplie. Nous n'avons plus qu'à
attendre une réponse, dit-il.
- Pff qu'est-ce qu'on va bien pouvoir faire pendant une semaine,
lui demanda Amara.
- Ben
attendre
- Est-ce que nous aurions dû nous arrêter quelque
part avant d'arriver à Brakmar ?
- Normalement non, nous allons à Brakmar directement et
le plus vite possible
Amara
pensa à se lever, mais elle ne pouvait toujours pas bouger.
- Vraiment efficace cette plante.
Lay sourit faiblement.
- Oui, mais des contresorts peuvent facilement la neutraliser.
- Il y a encore beaucoup de choses que je ne connais pas sur la
magie
- Bien sûr ! Mais nous aussi tu sais. Si tu as eu l'Oiseau
c'est que tu connais les brases, tout est dans l'entraînement
à présent.
En pensant à ses entraînements, le sourire d'Amara
s'effaça. Avec qui allait-elle s'entraîner maintenant
que Misugi n'était plus là ?
ShadowTony
posa sa main sur celle d'Amara d'un air désolé.
- Tu peux la libérer, Lay, murmura-t-il.
La petite corde végétale disparut du poignet de
la jeune fille qui serra la main de son frère.
Tous trois tournèrent la tête vivement quand un démon
cria :
- Lay !!!
Le jeune Sadida soupira et se leva.
- A tout à l'heure.
Il partit, ShadowTony et Amara se levèrent aussi, il lui
reprit le bras.
- Nous allons rentrer, d'accord ?
- Oui.
- Je préfère discuter à l'intérieur,
c'est moins risqué, dit-il en montrant les démons
discrètement.
Amara acquiesça d'un petit signe de tête et tous
deux retournèrent jusqu'à la petite cabine.
Eclairés par le bracelet de la jeune fille, ils n'avaient
même plus besoin de bougie. La pièce était
suffisamment éclairée pour que, près du bracelet,
les deux jeunes gens puissent se voir, se regarder.
Amara
se surprit à penser à il-de-loutre, sa grande
sur. Elle se rappelait quelques soirées passées
dans leur petite chambre mansardée, à la faible
lueur d'une petite bougie. il-de-loutre lui manquait aussi
beaucoup, et les moments passés avec ShadowTony lui rappelaient
il-de-loutre. Elle sourit à ShadowTony qui lui rendit
son sourire.
xxx
De son côté, ShadowTony ressentais d'étranges
sentiments. Chez les démons, il avait réussi à
se faire aimer et respecter par beaucoup, mais il n'avait qu'un
seul ami proche, Lay. Mais depuis que le Maître était
revenu, il avait eu peu d'occasions de parler avec lui, ça
lui manquait.
Il pensa tout d'abord que c'est ce qui faisait qu'il aimait être
avec Amara, à cause de ces instants privilégiés
qu'il passait seul à seule avec elle, à discuter
de tout et de rien. Mais il s'aperçut vite que c'était
autre chose. Il se sentait proche d'elle, il lui semblait avoir
enfin trouvé ce qu'il désirait depuis longtemps.
En effet, plus son père cherchait " l'enfant ",
plus ShadowTony cultivait le désir de rencontrer cet enfant.
Et il l'avait enfin retrouvée, il parlait avec elle et
pouvait la regarder, la toucher.
Amara lui ressemblait beaucoup, tant physiquement que par sa manière
de penser. Depuis leur rencontre, il faisait en sorte de pouvoir
passer le plus de temps possible avec elle. Chacun était
curieux de connaître le monde de l'autre, sa vie, l'endroit
d'où il venait. Mais ShadowTony n'osait pas trop lui poser
de questions, il ne voulait pas qu'Amara croie qu'il l'interrogeait
réellement au profit du Maître. La confiance que
lui accordait la jeune fille lui était précieuse.
Par chance, Amara parlait naturellement et lui disait ce qu'il
voulait savoir sans qu'il n'aie besoin de le lui demander.
ShadowTony avait hâte de pouvoir partir de cet endroit,
mais en même temps, il n'avait pas envie de quitter Amara,
il avait peur de ne pas la revoir avant un long moment. Mais il
ne pouvait pas l'emmener, c'était beaucoup trop risqué
et il ne devait pas faire passer son intérêt personnel
avant la survie d'Amara. C'est exactement ce que le Maître
aurait voulu qu'il fasse, et il ne pouvait se le permettre.
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ShadowTony était à nouveau plongé dans ses
pensées. Amara lâcha sa main et s'allongea sur le
matelas, derrière lui. Il se tourna et la regarda.
- Où as-tu eu cette cape ? Je n'en ai jamais vu de pareilles.
- Oh
Mes parents adoptifs me l'ont donnée avant que
je ne parte au berceau. Il parait que je l'avais sur moi quand
ils m'ont trouvée.
La jeune fille raconta le jour où on l'avait trouvée,
à la fontaine, tel que le lui avaient raconté ses
parents.
- Regarde.
Elle sortit la longue chaînette qu'elle avait autour du
cou, où les trois petites clés étaient accrochées.
- Je l'avais autour du cou quand on m'a trouvée.
ShadowTony prit les petites clés dans sa main, au dos figurait
une inscription gravée : Amara.
- Tu ne sais pas d'où ça peut bien venir ?
- Non. J'aimerais bien le savoir. Rien ne parle de cape ni de
trois petites clés dans les livres de la bibliothèque.
Je crois que je ne le saurais jamais ;
- Je ne pense pas que notre mère te les ait donnés,
elle ne t'avait même pas encore donné de nom et ne
t'avait présentée à personne, d'ailleurs
la plupart de démons ne savent pas que " l'enfant
" est une fille.
Ils discutèrent longtemps à nouveau.
En
début de soirée, on frappa à la porte. ShadowTony
se leva vivement.
- ShadowTony ? C'est moi
ShadowTony se rassit calmement en reconnaissant la voix de Lay.
- Tu peux entrer.
Le Sadida entra et referma la porte.
- Tu nous as fait peur, Lay.
- Désolé... j'apportais à manger. Je suppose
que tu ne mangeras pas avec eux, ShadowTony ?
- Tu supposes bien.
- C'est encore de la soupe, pour changer. Je me permets de me
joindre à vous.
Il posa la grosse casserole sur la caisse de bois et la rapprocha
du matelas. Il servit ensuite trois bols de l'épaisse soupe
de légumes.
Amara
se releva et s'assit au bord du matelas à côté
de ShadowTony. Lay reprit place devant eux, adossé à
la porte. Dans la petite cabine, il y avait à peine la
place pour les trois personnes, la caisse et le matelas.
- Merci Lay, dit Amara. C'est gentil de ta part.
Ils se mirent à manger.