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  Le Totem des 4 Eléments

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Le Totem des 4 Eléments

CHAPITRE 18 : Les frères Bouzouf

Il était toujours plongé dans ses pensées lorsqu'ils entrèrent sur le chemin de pavés qui menait au port. Des gardes étaient postés sur la route, Keazou s'approcha d'eux et leur expliqua la situation. Les gardes prirent la tête du groupe et l'escorta jusqu'en haut d'une grande colline à proximité du port, où ils avaient une belle vue sur la ville. Tous poussèrent des exclamations en regardant Sufokia du haut de la colline.
La ville était en fait bâtie sur l'eau. De grandes plates formes semblaient flotter sur les vagues de la crique. De très jolies maisons étaient construites sur ces plates formes, des fois sur plusieurs étages, ou sur des plates formes surélevées reliées par des ponts de rondins. De grandes arches fleuries apparaissaient çà et là, certaines façades de maisons étaient couvertes de plantes grimpantes d'où pendaient des grappes de fleurs multicolores.
Le garde les laissa à leur contemplation un instant avant de prendre la parole :
- Vous devez prendre le pont là-bas.
Il pointa du doigt un très grand pont qui reliait la terre à la ville.
- Après, tournez directement à droite jusqu'au bout de la plate forme, un pont vous conduira à l'auberge.
Il montrait maintenant un étrange point rouge au milieu d'une plate forme.
Le garde les raccompagna jusqu'à l'endroit où ils l'avaient rencontré, il leur indiqua la direction du pont et les salua.

Le groupe se dirigea dans la direction indiquée et traversa le pont. L'énorme craqueleur le faisait grincer sous son poids, Keazou ne semblait pas très rassuré quand il regardait l'eau sur les côtés du pont. Celui-ci était très long, beaucoup plus qu'ils ne se l'étaient imaginé en le voyant de haut. Ils se hâtèrent de le traverser et tournèrent à droite, suivant les conseils du garde.
Peu de temps après, ils finirent par rejoindre la plate forme de l'Auberge. Le bâtiment ressemblait à un énorme igloo de couleur rouge vif. Devant l'entrée, un panneau annonçait " Chez Timberrrrr, spécialités marines. "

Ils entrèrent. L'auberge était déserte, seul un homme, au comptoir, les accueillit.
- Bonjour m'sieur dames. Qu'est-ce que j'peux faire pour vous ?
Keazou s'approcha. L'homme portait un costume de marin.
- Nous voudrions dîner et passer la nuit ici, ainsi que prendre le petit déjeuner à l'auberge et emmener quelques provisions pour la journée. Nous sommes six.
- Pas d'problèmes vieux. Installez-vous.
Les jeunes gens assemblés au centre de la pièce semi-circulaire prirent place autour d'une grande table rectangulaire de bois simple. Autour d'eux, d'étranges instruments étaient posés sur des étagères, le long des murs. Hachoirs, couteaux et autres instruments de cuisines ainsi que d'autres accessoires de pêche étaient exposés là. Par les fenêtres, de petits hublots, on apercevait la mer, où le soleil ne tarderait pas à se coucher.
Le marin du comptoir revint et s'approcha de la table.
- Z'aimez le poisson j'espère, parce qu'ici y'a qu'ça !
Tous acquiescèrent.
- Bon, j'vous apporte l'plat du jour.

A la table, tout le monde commença à discuter, content de pouvoir s'asseoir après cette longue marche. Des odeurs de poisson grillé émanaient des cuisines, les faisant saliver.
Quelques minutes plus tard, un joyeux salut leur fit tourner la tête vers la porte des cuisines.
- Bonjour tout le monde !
Les six compagnons sourirent à la vue de ces étranges personnages. Tout habillés de bleu, les serveurs s'approchèrent d'eux en faisant de grotesques mimiques qui firent rire tout le monde. Les mains chargées d'assiettes, ils servirent Keazou et ses amis avec une étrange agilité vu la vitesse à laquelle ils tournoyaient autour de la table. L'un des deux serveurs portait une longue cape noire et un ridicule chapeau haut de forme de la même couleur. Il s'inclina avec élégance devant la table, malheureusement son grand chapeau tomba, rendant la situation encore plus ridicule.
- Les frères Bouzouf pour vous servir.
- Laissez les clients tranquilles, au boulot les frères guignols, gronda le marin.
Le deuxième serveur ramassa le chapeau de son frère et le posa sur sa tête. Il se redressa et dit d'un air sérieux :
- Aujourd'hui pour notre aimable clientèle, beignets de Greu-Vette et crabe Sourimi maison sur son lit d'œufs de goujon. Le tout accompagné d'une succulente sauce citronnée et de sa feuille de menthe sauvage. Petit vin blanc de pays offert.
Les deux jeunes hommes semblaient avoir une vingtaine d'années, ils avaient un visage gai et moqueur. Ils se retirèrent, tournoyant toujours dans la salle.
Chacun commença à manger, faisant quelques commentaires sur l'excellence de la nourriture.
A la fin de l'entrée, les frères Bouzouf revinrent et les assiettes furent débarrassées aussi vite qu'elles étaient arrivées.
Le plat principal dégageait une succulente odeur alors que les serveurs posaient les assiettes sur la table. Le serveur qui avait maintenant le chapeau annonça :
- Filet de truite grillée et sa sauce aux petits légumes. Poissons panés du port et Poisson-Chatons entiers nappés d'une légère sauce aux champignons d'Amakna. Le tout servi avec une pomme de terre dorée au four.

Les six compagnons mis en appétit par l'entrée se mirent à manger joyeusement leur plat. Loulou ne parlait pas beaucoup, mais elle semblait apprécier l'ambiance et le repas. Keazou était heureux qu'elle se détende un peu.
Les Bouzouf placèrent deux grands tabourets près de la table et s'y installèrent. Ils engagèrent la conversation :
- Qu'est-ce qui vous amène par ici ? Demanda l'un des deux.
- Attends, attends Dark, on s'est même pas présenté, répondit celui au chapeau.
- Ah, oui, c'est vrai. Vas-y.
- On est les frères Bouzouf. Moi c'est Warrior, ou War. Lui c'est Dark.
- Et vous ?
Tout le monde donne son prénom, ils dirent brièvement d'où ils venaient.
War, le serveur au chapeau, montra le petit oiseau d'argent de la chaîne qu'il portait autour du cou.
- Moi aussi je viens de là-bas, enfin… ça fait quelques années déjà. Alors, qu'est-ce que vous venez faire à Sufokia ?
Keazou regarda ses compagnons puis prit la parole.
- Nous allons au camp des Chevaliers de la Terre.
A ces mots Dark annonça que c'est de là qu'il venait, montrant une broche d'argent aux reflets verts, le même métal que celui qui figurait sur le pommeau de l'épée de Keazou.
- Bon… Nous allons chez les Chevaliers de la Terre pour chercher de l'aide. Quelqu'un a été enlevé par des démons et nous avons besoin d'un maximum de volontaires pour combattre les démons.
- Oh… d'accord.
Les assiettes s'étaient vidées pendant la discussion. Les serveurs se relevèrent et débarrassèrent la table. Ils revirent avec six coupes à dessert qu'ils posèrent devant leurs hôtes. Dark s'éloigna pendant que War présentait le dessert :
- Coupes de glace aux fraises mixées des côtes d'Asse recouvertes d'une quantité phénoménale de crème chantilly.
En effet, les coupes débordaient de chantilly, quelques grosses fraises bien mures étaient disposées autour d'une boule de glace rose.

- Et maintenant, que le spectacle commence !!!
Les six compagnons se tournèrent vers le fond de la salle. Une mince estrade de bois qu'ils n'avaient pas remarquée se trouvait dans l'angle de la salle. A droite de l'estrade, un grand rideau rouge. A gauche, un gros coussin de velours. War disposa deux grands bougeoirs sur la table et les alluma. Pendant que Dark allumait les torches autour de l'estrade, War fit le tour du restaurant et éteignit toutes les bougies.
Les six compagnons, surpris, s'échangeaient regards et sourires curieux. War jeta le chapeau à son frère et disparut derrière le grand rideau, à l'extrémité de la scène.
Dark plaça le chapeau sur le haut de son crâne.
- Mesdames, mesdemoiselles, messieurs, bonjour ! Bienvenue dans mon humble théâtre.
La voix de War se fit entendre à travers le rideau.
- Bouhhhhhhh !
Dark l'ignora et prit un air outré.
- Votre venue n'étant pas attendue, Nobles visiteurs, nous n'avons pas eu le temps de vous préparer un spectacle digne de votre rang. C'est pourquoi je vais vous chanter quelques petites chansons de ma composition.
Et Dark se mit a chanter, au plus grand désespoir de son public.
- Oh doux soleil d'AAAmakna ! Qui brille au desssssus de moâaâaâAaa ! Pourquôaa m'as-tu laisséééé !?

Alors qu'il chantait, de minces éclairs brillèrent sur la scène dans un bruit assourdissant, éclairant la pièce de flashes bleutés. Ce qui ne semblait pas gêner le chanteur.
- Pourquôa m'as-tu laisséééé !? Si seuuul au mondeuuuh… Je t'ai aiiiméééee, mon am…
A ce moment, tout le monde se mit à rire : le chapeau du chanteur venait de tomber, renversé par un gros tofu. War qui était sorti de derrière le rideau tenait un autre tofu dans chaque main.
- Silence ! Faites cesser cet horrible bruit !
Il lança un autre tofu sur le chanteur qui l'évita. L'oiseau se posa au sol un peu plus loin, en voletant gracieusement.
- Tu me le payeras vile créature ! Cria Dark en sortant un hachoir à poisson. Approche que je t'ouvre le ventre !

War s'approcha courageusement. Dark, faisant mine d'être hors de lui, se jeta sur celui qui avait gâché sa chanson. Ce dernier, plus vif, l'évita. Dark continua dans son élan et s'arrêta net devant une étrange créature.
Cette créature, toute petite, avait une épaisse peau grisâtre et un énorme nez sur lequel reposaient de petites lunettes rondes. Il ressemblait à un petit homme particulièrement moche, avec une grosse tête aux yeux globuleux et aux oreilles pointues. Il portait dans ses mains un gros livre qu'il tenait à l'envers : c'était un Bwork Mage. Les quatre gros tofus le suivaient de près.
En ce qui concernait sa taille, il devait arriver aux genoux de Dark, pourtant celui-ci recula de quelques pas. War le regardait, le sourire aux lèvres.
Dark recula encore. Le Bwork fit claquer son livre en le fermant et en le rouvrant. Un éclair apparut dans un grand bruit aux pieds de Dark qui fit un bond en arrière pour atterrir sur le coussin de velours qui avait sûrement été placé là à cet usage.

Rapide, Dark sortit un arc de derrière le coussin et se leva.
La créature n'avait pas bougé mais les quatre tofus étaient tous au milieu de la pièce. Quand Dark tendit la corde de son arc, une fine flèche apparut. Il la décocha vers le groupe de tofus qui commença à piailler d'un air indigné en courant sur la scène.
- Alors perturbateur ? Tu préfères ça plutôt que ma chanson ?
- Oui !
Une volée de flèches fusèrent vers War, se heurtant au mur tout autour de lui et disparaissant en touchant le mur.
Les tofus piaillaient furieusement, le bwork grognait et illuminait la scène de ses éclairs bruyants.
War s'écria :
- STOP !
Et tout se figea sur la scène. Dark, les mains sur son arc, regardait les quatre tofus, assis sur leur derrière, les yeux levés vers War. Le Bwork restait là sans bouger.

War s'approcha des quatre tofus qui volèrent vers lui et les prit dans ses mains. Dark se leva et lui fit face. Il jeta un œil au public amusé qui finissait de manger et annonça :
- Et maintenant pour vous, après le lancer de tofu, la chasse au tofu et le concert des tofus, les Bouzouf sont fiers de vous présenter un spectacle inédit et inoubliable : Le vol des tofus !
War commença, il lança un tofu à Dark qui le rattrapa. Il fit de même avec les trois autres tofus et Dark se mit à jongler avec les quatre boules de plumes jaunes. Les oiseaux voletant plus haut que de simples balles, les deux comédiens n'avaient aucun mal à jongler avec les petites bêtes qui semblaient beaucoup s'amuser.
Les frères Bouzouf exécutèrent de nombreuses figures en lançant les tofus en l'air, les faisant se croiser, se doubler. Après nombreux tours de passe-passe, les Bouzouf posèrent délicatement les tofus par terre.

Tout le monde éclata de rire : les petits animaux semblaient avoir le tournis et marchaient dans tous les sens. L'un deux roula sur lui-même et tomba hors de l'estrade. Globox le récupéra et le porta jusqu'à la scène. Elle le posa dans le chapeau renversé. Les comédiens saluèrent et tout le monde applaudit vivement en riant.

Les sept compagnons, l'estomac plein, totalement détendus, ressentaient présent la fatigue de la journée. Une fois la table débarrassée, les deux comédiens redevenus serveurs accompagnèrent les jeunes gens à l'étage. Il n'y avait que deux chambres, les deux filles prirent la plus petite, les quatre garçons, la plus grande. Ils partiraient dès le lever du jouer et décidèrent de se coucher immédiatement.


ooo

Dans la sombre cabine du bateau, Amara avait du mal à croire ce que lui disait ShadowTony… Pourtant il semblait sincère, et sa version des faits collait parfaitement à la réalité. ShadowTony ne ressemblait plus au démon pour lequel il s'était fait passer. Il souriait beaucoup. Quand il réfléchissait, sa ressemblance avec Amara était frappante.
- J'ai été élevé seul au milieu de milliers d'hommes et de femmes tous plus cruels les uns que les autres, je te laisse imaginer le nombre de fois où j'ai eu l'occasion de sourire durant toutes ces années. Les démons, eux, sont heureux quand tout va mal, ils éclatent de rire quand ils voient le sang couler… La vie de quelqu'un de " normal " parmi eux n'est pas vraiment heureuse. Il faut avoir le cœur bien accroché pour supporter tant de cruauté.
- Mais il y a d'autres personnes comme toi parmi les démons ?
- Oui, pas beaucoup mais il y en a. Il y en a même un autre sur ce bateau. Je le connais depuis très longtemps. Mais comme tout le monde sur ce bateau, il n'a pas le droit de s'approcher de toi. Le chef a dit à tous les démons que tu étais dangereuse. Ils ne sont pas autorisés à s'approcher de toi, mais je crois que même s'ils le pouvaient ils ne le feraient pas.

Amara resta bouche bée. Elle ? Faire peur à toute une bande de démons ?
- Mais je ne me soucie pas de ce qu'il dit. Ces démons sont idiots. Si je n'avais pas été là tu serais probablement en train de mourir de faim et de froid… Ils sont bêtes, leur maître doit absolument te trouver vivante…
- Et l'ami dont tu parles, il a… peur ? De moi ?
- Non, ça m'étonnerait. Mais il n'a pas autant de droits que moi sur le bateau. En tant que fils du roi de Brakmar, je peux me permettre de ne pas obéir au chef. Il ne m'aime pas beaucoup d'ailleurs, et je le lui rends bien.

- Qui est le… gros homme qui se trouvait dans la pièce à côté ? Il ne ressemble pas à un démon.
- C'est… le capitaine de ce bateau. Tout son équipage l'a quitté, sûrement en quête d'un autre capitaine. Celui-ci est constamment saoul. D'ailleurs nous lui avons échangé quelques bouteilles de Rhum contre son bateau… Nous l'avons emmené avec nous, il ne doit pas répéter partout le peu de choses qu'il connaît à propos des plans des démons.

Les deux jeunes gens parlaient comme ça depuis le début de la soirée, Amara posant toujours plus de questions. Le soleil était couché depuis un moment déjà mais ils ne se lassaient pas l'un de l'autre. Ils parlaient à mi-voix pour ne pas attirer l'attention.
- Je n'arrive toujours pas à y croire. Il y a seulement quelques mois je vivais dans une petite chaumière aux abords d'Amakna avec ma sœur adoptive et ses parents, avec pour seuls amis un petit tofu et un jeune bouftou. Découvrir la magie a déjà été suffisamment surprenant, puis il y a eu le berceau, mes amis, Loulou ma compagne de chambre… Puis il y a eu Misugi…
Sa voix se brisa quand elle prononça son nom.
- Je suis désolé Amara… ça doit être vraiment terrible pour toi… ça n'aurait pas dû arriver.
Amara secoua la tête, des larmes coulaient sur ses joues. Le jeune homme semblait sincèrement désolé, et les larmes d'Amara le rendaient triste.
C'était la première fois qu'il la voyait, il avait passé seulement quelques heures à ses côtés, pourtant il l'aimait déjà énormément et ressentait une certaine affection pour la pauvre jeune fille. Il s'approcha d'elle et lui posa la main sur l'épaule en signe de réconfort.
Elle continua son récit d'une petite voix.
- Ensuite, nous avons trouvé un homme sur la plage qui avait été blessé par des monstres dont j'ignorais totalement l'existence… Peu de temps après je me fais enlever par des démons, qui représentaient encore une chose nouvelle pour moi. Ces démons tuent… quelqu'un sous mes yeux. Puis je suis enfermée dans cet horrible endroit, dans le froid, sur un bateau ou des hommes sanguinaires ont peur de moi. Pas longtemps après, un démon m'effraye et je manque de me faire dévorer par un dragonnet…
ShadowTony rit légèrement.
- Il n'est pas méchant, c'est le mien. Je suis désolée, je ne voulais pas t'effrayer Je savais qu'il ne te ferait pas de mal.
Des larmes coulaient toujours sur le doux visage d'Amara. Elle n'avait pas eu l'occasion de confier ce qu'elle avait sur le cœur à qui que ce soit et voilà qu'elle se mettait à parler avec un parfait inconnu.
- Et maintenant, l'homme qui me faisait peur, avec son dragonnet, m'annonce qu'il est mon frère… Tu ne trouves pas tout ça exagéré quand toutes ces aventures arrivent à une seule personne en si peu de temps ?
- C'est vrai… et je sais malheureusement que ça n'est pas fini.

- Que va-t-on faire quand nous sortirons d'ici, ShadowTony ?
- Je n'en ai pas la moindre idée. Pour ma part je pense essayer d'empêcher certaines choses de se passer ; le maître m'a confié certaines missions que je veux l'empêcher d'accomplir. Il faut mettre toutes les chances de ton côté.
- Et moi ? Qu'est-ce que je devrai faire ?
- Tu resteras avec ceux qui viendront te délivrer, ils sauront ce qu'il faut faire. Quand j'aurai fait ce que je dois faire, je reviendrai près de toi pour t'aider dans ta quête.
Amara sourit faiblement.
- Merci…
- Je vais partir maintenant, il se fait tard, les autres vont se demander si tu ne m'as pas attaquée, dit-il, un soupçon d'ironie dans la voix. Tu devrais dormir, je repasserai demain.
- D'accord, lui répondit-elle en souriant. Bonne nuit.
Il se leva et ramassa les vêtements noirs, il les remit et sorti d'un air faussement majestueux.
Amara rit légèrement avait de souffler sur la bougie qui s'éteignit, plongeant la pièce dans le noir total.

Elle se coucha et se recouvrit de la lourde cape orangée. Elle ferma les yeux et repensa longuement à cette conversation, un léger sourire aux lèvres.
Elle se sentait mieux, moralement. Elle avait pu se confier à quelqu'un et avait enfin eu des réponses aux questions qu'elle s'était souvent posées. Elle n'était plus désespérée comme au début. Elle n'était plus seule à bord du bateau, il y avait quelqu'un qui s'occupait d'elle et qui semblait l'apprécier : son frère, ShadowTony.
De plus, ses amis viendraient sûrement la secourir, ShadowTony leur avait envoyé un message et ils savaient où elle était.
La jeune fille s'endormit sur ces pensées, soulagée.


ooo

Une fine horloge de chêne fit tinter ses petites clochettes dans le silence nocturne de Sufokia. Dans une petite auberge du bord de mer, six voyageurs s'éveillent d'un profond sommeil. Le soleil n'est pas encore levé, il est encore très tôt.

Keazou sortit de sa chambre alors que ses compagnons se réveillaient. Il frappa à la porte de la chambre des filles et s'assura qu'elles étaient réveillées, puis il descendit. Le petit déjeuner était servi sur la grande table. Devant la porte des cuisines, les deux serveurs ne semblaient pas bien réveillés. Ils étaient debout, appuyés l'un sur l'autre, les yeux à moitié ouverts. War ouvrit un œil.
- 'Alut Kea.
- Salut les gars, ça va ? Demanda-t-il en souriant.
- Ouaip ça va, vous voulez à manger pour la route ?
Keazou acquiesça et les frères partirent dans les cuisines. Peu à peu les compagnons de Keazou vinrent s'asseoir près de lui, à table.
Sur la table, du pain frais, du beurre et des confitures étaient entourés de carafes de lait, café et jus de fruits. Les animaux de Globox qui étaient restés dans la grande salle se réveillaient à leur tour. La jeune fille leur donnait quelques choses à manger.
Les Bouzouf se joignirent à eux pour déjeuner. Tous les huit se réveillaient doucement en déjeunant. Le soleil avant de se lever donnait une magnifique couleur rose au ciel qui s'éclaircissait peu à peu et à la surface de l'eau. La pièce s'éclairait, le temps allait à nouveau être parfait jusqu'à la prochaine étape de leur voyage.

A la fin du petit déjeuner, les deux serveurs apportèrent aux voyageurs des provisions dans des sacs en papier. Ils les rangèrent dans leur sac puis partirent, non sans avoir salué chaleureusement les serveurs.
Ils retraversèrent le ponton de rondins puis le grand pont qui menait à la terre ferme. Ils grimpèrent sur la colline d'où ils avaient contemplé la ville, la veille. Ils regardèrent le soleil se lever sur la mer.
Ils reprirent ensuite leur route vers le Sud. Ils devaient longer la côte jusqu'au soir.
Ils continuèrent leur route dans la plaine d'herbe sèche. La brise maritime apportait une agréable fraîcheur à l'air.
Après une heure de marche dans la plaine, les jeunes gens arrivèrent dans un bosquet de grands arbres et buissons touffus. Ils avancèrent lentement. Soudain Djahil qui se tenait à droite de Keazou fit un brusque écart et bouscula son compagnon.
Le groupe s'arrêta, Djahil venait d'éviter un groupe de deux jeunes Milimulous qui se battaient, plantant leurs petits crocs pointus l'un dans la fourrure de l'autre.
Quand les deux jeunes animaux aperçurent le groupe de voyageurs, l'un des deux se mit à grogner en les menaçant de ses petites pattes griffues. Ils étaient petits, n'arrivaient même pas à l'épaule de DrouVirus.
Les six compagnons ignorèrent les animaux et voulurent continuer leur route. Mais les Milimulous leur barrèrent la route. L'un d'eux poussa un rugissement sonore. Les jeunes gens s'immobilisèrent en entendant le même cri, fortement amplifié, plus loin dans la forêt.
Ils regardèrent dans cette direction et tendirent l'oreille. Les grognements d'une bête se rapprochaient à toute vitesse. Reprenant leurs esprits, Djahil et Beothien commencèrent a créer leur bouclier, les fées murmurèrent quelques paroles magiques, et les six compagnons se préparèrent au combat.
Tout à coup, une ombre gigantesque leur cacha le soleil : une bête monstrueuse écartait les buissons et petits arbres, prête à se jeter sur eux. L'animal ressemblait aux petits Milimulous, mais ils étaient de couleur claire, presque blanche, avec des reflets violets. Ils avaient une grosse tête avec de petites oreilles et un long museau, une mâchoire puissante et des crocs… tranchants.
C'était un Meulou. Il mesurait plus de deux fois la taille de Keazou et avait des pattes énormes pourvues de longues griffes pointues.
Il se tenait sur ses pattes arrière et les regardait de ses yeux rouges et cruels.
Les jeunes gens reculèrent, pris au dépourvu par l'énorme monstre.

Beothien lança son bouclier enflammé sur le sol, sous les pattes du Meulou, mais celui-ci, rapide et agile s'empressa de sortir de la zone brûlante, ce qui eut pour effet de le mettre en colère. Les bâtons de Djahil et Beothien étaient inutiles contre l'énorme animal, aussi ne prenaient ils pas le risque de s'en approcher. Globox lança son craqueleur à l'attaque, mais même lui ne faisait qu'un peu plus de la moitié de la taille de la bête ; il avait beau le rouer de coups, l'animal ne s'en préoccupait même pas.
Mais quand le Meulou voulut s'approcher de Loulou, le Craqueleur lui agrippa la patte et l'empêcha de bouger un instant. L'animal se dégagea et envoya le craqueleur s'écrouler contre un arbre. Le Meulou se tourna vers Globox et se rua sur elle, il la blessa violement au ventre.
Loulou courut courageusement vers elle et commença à la soigner. DrouVirus, furieux, détacha un fin marteau de métal qui était attaché à sa ceinture et le lança sur le museau de la bête, tel un gros boomerang.
Au même moment, Keazou qui avait profité de la diversion pour se glisser entre les pattes du géant, son épée à la main, lui entailla cruellement le flanc. Le Meulou glapis de douleur en recevant le marteau sur le museau et hurla en sentant l'épée de Keazou le blesser. Mais les coups n'eurent à nouveau pour effet que de redoubler la fureur de l'animal qui, aveuglé par le sang qui giclait des blessures causées par le marteau, se jeta au milieu du groupe. Globox, à nouveau sur pieds, envoya d'un coup l'énergie qu'elle avait accumulée après les soins. Le feu brûla le ventre du Meulou qui hurla à nouveau, une entaille de peau brûlée apparaissant sur son ventre.
Devant la folie de la bête, les six compagnons commençaient à envisager la fuite, quand soudain l'animal se retourna, malheureusement pour lui : une volée de traits lumineux se plantèrent dans son épaisse peau. Soudain un homme surgit des buissons et se glissa vers la bête, envoyant du feu vers lui.
DrouVirus cria :
- C'est War !
Quand le Meulou voulut se retourner vers eux, un nouvel assaut de petites flèches lumineuses lui tomba dessus. Il hurla, et à sa voix se mêla le cri de guerre de Dark qui sauta avec agilité de la branche sur laquelle il était perché. Son arc à la main, il décochait des flèches magiques sur l'animal fou.
Il vint se ranger aux côtés des six compagnons, War en fit autant.
- Salut les copains, besoin d'un coup de main ? Lança Dark avant de continuer à tirer sur la bête pour la maintenir à distance.
Les deux fées se concentrèrent en même temps que Djahil, DrouVirus, Globox et War. Quelques instants plus tard, une vague de flammes jaillit vers le Meulou et le terrassa. L'animal fut projeté sur une grosse pierre et ne se releva plus. Tour sembler fini lorsque War cria :
- Attention !
Au même moment des éclairs vinrent s'écraser juste derrière Loulou. La jeune fille sursauta violement et fit volte-face. Un des éclairs du Bwork Mage de War venait d'anéantir le Milimulou qui s'était glissé en silence derrière la jeune fée. Le deuxième Milimulou prit la fuite.
Chacun reprenait son souffle. Le combat aurait bien pu tourner à la catastrophe sans l'intervention de leurs amis.
- Eh ben, on peut dire que vous tombez à pic vous deux. Qu'est-ce que vous faites dans le coin ? Demanda Djahil.
- Ben…vous nous avez dit que vous aviez besoin du maximum de volontaires. Après réflexion, on s'est dit qu'on était volontaires.
War acquiesça aux paroles de son frère en souriant.
- Oui, on pensait que vous auriez besoin de deux hommes beaux et forts pour vous tenir compagnie, ajouta-t-il.
Keazou sourit.
- Vous êtes les bienvenus les garçons, c'est gentil de vous joindre à nous.
Dark rangea son arc et s'assit dans l'herbe à côté de Loulou qui se remettait de sa peur. Il sortit une pomme de son sac et croqua dedans avec appétit.
- Tout ça vaut bien un petit en-cas !
DrouVirus sourit et s'assit à côté d'eux, suivant l'exemple, tout le monde fit de même. Ils ouvrirent leur sac, le pique-nique prévu était assez conséquent, tout était bien rangé et emballé, chacun sortit une pomme de son sac et la mangea en silence.
Keazou regardait le Meulou immobile.
- En tout cas la prochaine fois que je croiserai un animal, même plus petit que Drou, je m'attarderai pas près de lui.
- Oui, vous avez pas eu de chance, d'habitude c'est plutôt des scarafeuilles par ici. Il n'y a pas beaucoup de Meulous, répondit War, souriant toujours.
- En tout cas il y en a un de moins maintenant, plaisanta Djahil.

Beothien tenta de retenir un gémissement lorsqu'il bougea le bras. Il releva sa manche légèrement déchirée. Une fine coupure teintait son avant bras de rouge.
La douleur se lut sur son visage durant quelques secondes, puis il reprit une expression neutre. Loulou s'approcha et murmura quelques mots. La très légère coupure se referma, ne laissant qu'une marque claire à l'endroit de la blessure.
Keazou trouvait ce jeune homme très étrange. Beothien parlait peu, il réagissait à certains moments, mais à d'autres il restait totalement indifférent à ce qui l'entourait. Keazou le trouvait vraiment lunatique.
Le bras de Beothien était toujours douloureux, DrouVirus essayait de le soigner, la douleur diminua mais ne disparut pas totalement.
- Merci Drou et Lou, ça va aller maintenant, avança-t-il avec un faible sourire. Ce n'est qu'une coupure.
Les fées retournèrent s'asseoir.

Keazou se leva et trébucha sur un tofu, il se rattrapa à une branche toute proche. En voyant le tofu, il eut une brève pensée pour Amara. Il sourit et demanda à War :
- D'où ils viennent ces tofus ?
A ce moment, le Bwork Mage vint récupérer le tofu qui frottait sa tête à la botte de Keazou.
- Et lui ? D'où il vient ?
War sourit encore plus au souvenir de sa rencontre avec ses animaux, il raconta :
- Elle. C'est une femelle. Avant de travailler au port, j'étais dans une auberge de campagne, à Amakna. Je vivais dans la ferme qui livrait ses produits à l'auberge. Un jour, en ramassant les œufs de tofu de la ferme, je rencontre une drôle de maman tofu au milieu de l'un des nids. Le Bwork Mage avec son livre était assis à l'arrière du nid, quatre tofus nouveau nés dormaient devant elle. Bof, elle avait pas l'air méchante, alors je l'ai laissée là. Durant les deux mois que j'ai passé à la ferme. Le Bwork a pris l'habitude de me suivre. Les tofus ont grandi et ont pris l'habitude de suivre le Bwork. Donc voilà, je me retrouve avec cinq animaux qui me suivent comme mon ombre. Les tofus ont une bonne mémoire, on s'est amusé à leur apprendre des tours.
- D'ailleurs ça tombe bien, comme vous avez pu le voir, le marin du port et la déco de l'auberge ne sont pas très gais, il fallait mettre un peu d'animation pour garder les clients, continua Dark, plaisantant à moitié.

Les huit compagnons se levèrent et reprirent leur marche. Au bout de quelques minutes ils sortirent du petit bosquet. Ils avancèrent sur la plage. A perte de vue, il n'y avait que la mer, bordée d'une immense plage de sable clair. L'air frais du matin faisait onduler l'eau, au milieu des vagues.
A nouveau, Keazou eut une pensée pour Amara, il repensa au moment où il l'avait vue sur la plage, après avoir été soigné par les fées du berceau.
Ils continuèrent à marcher ainsi au milieu du sable pendant une grande partie de la matinée.



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