CHAPITRE 15 : Fraternité
La jeune fille attendit que ShadowTony soit parti pour sortir de la pièce. Elle retourna jusqu'à la petite cabine, les démons l'ignoraient. Seul le gros pirate poussa un grognement à son passage ; elle se hâta de regagner sa cabine, récupéra la cape qu'elle avait laissé sur le matelas et l'accrocha autour de ses épaules. Elle resta debout appuyée contre le mur du fond. Elle ne savait toujours pas quoi penser de ce démon, d'instinct elle s'était fiée à lui. Elle espérait qu'il lui apporterait quelques explications.
Peu de temps après, elle leva les yeux sur la porte qui s'ouvrit. Le démon entra et la porte se referma sur lui. Il avait dans ses mains une sorte de grand bol en bois et une longue bougie de cire blanche.
L'homme regarda autour de lui.
- Ca manque un peu de table et de chaises ici. Mais bon, ça ira. Assied-toi Amara.
Il s'approcha d'elle et fixa la bougie allumée au sol, tout près d'eux.
Amara s'exécuta et s'installa sur le matelas.A nouveau, malgré sa robe déchirée, ShadowTony trouva la prisonnière très belle et en ressentit une sorte de fierté.
Il fut tiré de ses pensées par Amara qui dit :
- Vous connaissez mon prénom
- Je vais t'expliquer tout ça. Pour l'instant tu dois avoir faim, non ?
Il lui tendit le bol. Il contenait une épaisse soupe de légumes. Une grossière cuillère en bois dépassait du bol.
La jeune fille s'aperçut avec étonnement qu'elle avait réellement faim. L'odeur de la soupe avait réveillé son appétit. Une foule de questions se bousculaient dans sa tête.
- Merci pourquoi est-ce que
- Je vais tout t'expliquer, répéta-t-il. Mange.
Il montra le matelas d'un signe de tête.
- Je peux m'asseoir ?
La jeune fille se poussa sur le côté afin de lui laisser de la place. Il s'assit à côté d'elle.
- Merci.
Elle commença à manger. La soupe chaude apaisait son estomac affamé.
- Bon - Je vais te révéler des choses que nous devrons être les seuls à savoir, c'est très important.
Amara hocha la tête. Soupçonnant toujours un piège, elle avait décidé de lui en dire le moins possible.
- Tout d'abord, je ne suis pas un démon.
Il se releva.
- Attends.
Il sortit et longea la grande salle où il vérifia s'il n'y avait personne qui pouvait les espionner.
Il revint dans la cabine et ferma soigneusement la porte, il répéta :
- C'est très important.- Qu'est-ce qui peut vous différencier d'un démon ?
- Les démons sont comme es monstres, mais au niveau humain. Ils ont été soumis aux forces démoniaques et ont perdu toute humanité. Leur âme en quelque sorte. Tu connais la prophétie il me semble ?
- Oui.
- Eh bien, à partir de maintenant, la plupart des démons que tu croiseras ont été ensorcelés par le maître du mal lui-même. Non seulement ils ont perdu le statut de l'être humain tout en gardant leur intelligence, mais ils ont été dotés d'une grande cruauté et d'une immense détermination à accomplir les " missions " que le maître leur donne. Pour l'instant leur mission est de te ramener à leur maître.- Mais si vous n'êtes pas un démon... Que faites vous à bord de ce bateau ? demanda Amara qui ne comprenait pas vraiment ce que l'homme lui disait.
Il réfléchit.
- Tu n'es pas obligée de croire ce que je vais te dire, mais j'aimerai que tu le saches. La prophétie parle d'un enfant qui serait recherché par son père, n'est-ce pas ? Il se trouve que cet homme est mon père. Et que, de ce fait, étant trop âgé pour être celui dont parle la prophétie, l'enfant serait mon petit frère. Et plus précisément ici, ma petite sur.
- Et... cette petite sur, c'est moi
- Oui, donc tu comprendras au moins pourquoi je me suis un peu occupé de toi quand tu es arrivée ici.
Amara avait du mal à croire ce qu'il venait de lui dire. Mais elle avait encore de nombreuses questions à poser et ne pouvait plus retenir sa curiosité.- Pourquoi êtes-vous avec les démons ?
- Tu as vu comment ils te traitaient ? Quand mon
Il se reprit avec un sourire :
- Quand notre père a envoyé ses hommes chercher l'enfant - toi - je lui ai fait la fausse promesse de te ramener coûte que coûte. Aucun des démons ne sait que je ne suis pas de leur côté. J'ai pu prévenir du monde sur le continent - le tofu n'est peut-être pas très malin, mais il a une très bonne mémoire. Et un tofu adulte vole très bien - ce qui m'a permis de leur donner de nombreux renseignements. Je n'ai pas eu de réponse, mais je suis certain qu'ils ont eu mon message.- Qui est notre père ?
- Malheureusement, c'est un des plus cruels démons qui existe c'est parce qu'il a été ensorcelé il y a très longtemps, peu de temps après ta naissance. Je ne sais pas si le sort ne sera pas irréversible pour lui.- Est-ce que vous savez quelque chose sur le jour où l'on m'a retrouvée près de la fontaine ?
- D'après ce qu'on raconte, le démon qui t'a amenée là avait des pouvoirs si puissants qu'il a réussi à se libérer de l'emprise du mal et à s'enfuir. C'est tout ce que je sais.Amara ne pouvait plus s'empêcher de parler, elle avait l'impression d'avoir de plus en plus de questions qui affluaient à son esprit.
- Vous connaissez mon prénom quel est le votre ?
- Oh, bien sûr.
Il se leva et fit face à la jeune fille.
Il était couvert d'une fine tunique noire reliée sur les cotés par des attaches d'argent. Une capuche masquait ses cheveux et une grande partie de son visage. Il retira la capuche, dévoilant des cheveux d'un vert très clair et un visage pâle, fin.
Il desserra ensuite les fines attaches d'argent sur els côtés de la tunique noire et la fit passer au dessus de sa tête.
Amara fut surprise, le jeune homme portait des vêtements où se mêlaient l'orange foncé et le vert clair, de couleur semblable à celle de ses cheveux. Ses vêtements ressemblaient à ceux de Misugi, un simple short et un débardeur assorti.
Amara l'observa attentivement, il était indéniable qu'ils étaient de la même famille.
Les traits du jeune homme étaient semblables à ceux d'Amara, et ils devaient en plus de ça avoir, à quelques années près, le même âge.Bien qu'Amara n'ait crû, à travers les vêtements noirs de démon, qu'elle avait à faire à un homme beaucoup plus âgé qu'elle, c'était un visage d'adolescent qui était apparu sous la lourde capuche.
- Je m'appelle ShadowTony.
- Tu n'as pas l'air beaucoup plus vieux que moi.
- Tu as eu quinze ans au début de l'été, je viens d'en avoir 16.- Est-ce que tu peux me dire quelque chose sur notre mère ?
- Oui, on raconte beaucoup de choses sur elle. Quand j'allais avoir un an, elle n'avait déjà plus le droit de m'approcher. Notre père me gardait tout le temps auprès de lui. A ta naissance, il a essayé de t'enlever, en vain ? Notre mère t'a emmenée avec elle sur une île inconnue. Elle est revenue, disant que tu t'étais noyée dans la mer. Mais celui que les démons appellent " maître " savait que tu n'étais pas morte, il a envoyé des milliers d'hommes à ta recherche. Mon père qui s'était juré de te retrouver m'a emmené avec lui sur son bateau. Il a torturé notre mère pour savoir où tu étais, voyant qu'elle ne voulait rien dire, il l'a tuée. Il a ensuite parcouru terres et mers à ta recherche. Mais d'autres bateaux de démons te recherchaient, c'est comme ça que deux ans après ta disparition, notre père a entendu une histoire racontant qu'un démon avait sauvé un enfant et l'avait confié à un petit village. Il a continué à chercher cet enfant mais un puissant sortilège, où plutôt une protection avait été accordée a l'enfant et malgré tous les sorts de localisation que lançaient les démons, il était impossible de te retrouver. Du moins jusqu'au moment ou tu as utilisé la magie pour la première fois. Quant à moi, j'ai été élevé par des démons et parmi eux. J'écoutais dans les tavernes tout ce que l'on racontait sur l'enfant qui devait être mon frère.
Il sourit à cette phrase.
- Tout petit déjà, je m'intéressais à cette histoire et me suis promis de te retrouver un jour. Ayant été élevé par des démons, tous on cru que j'en étais un moi-même. Notre père est devenu Roi de Brakmar, la ville des démons, à l'aide du maître. Il attend que nous te ramenions à lui.
oooPendant qu'Amara discutait avec son frère nouvellement retrouvé, la troupe de Keazou était repartie du bord de ce petit étang où ils avaient fait une pause. Après un long après-midi de marche sur un petit sentier de campagne sans incident notable, le groupe marchait dans une plaine d'herbe sèche aux belles couleurs du chaud été qui avait débuté.
A l'horizon, il leur semblait voir la mer, à seulement quelques heures de marche. Le soleil déclinait peut à peu, créant un reflet doré sur l'herbe sèche de la plaine. Le spectacle était magnifique.
Les sept compagnons marchaient calmement, sans parler. La température était idéale pour voyager en ce début de soirée.
- Nous sommes dans les temps jusqu'à présent. Nous arriverons dans un petit peu plus de 2h30 à Sufokia où nous logerons à l'auberge du port jusqu'à demain matin. Le voyage de demain devrait être agréable, nous marcherons toute la journée en bord de mer. Il devrait faire beau et nous passerons la nuit à la belle étoile.
Ils continuèrent leur route ainsi à travers la plaine. Une forte brise maritime s'était levée au fur et à mesure qu'ils approchaient de la mer.
Ils marchaient un peu plus vite, pressés d'arriver, quand soudain DrouVirus montra un point au loin et s'exclama :
- C'est le port, nous sommes presque arrivés !
- En effet, répondit Keazou, nous devrions arriver dans une demi heure maximum.
Il marchait en tenant la main de Loulou. Celle-ci avait l'air totalement indifférente à tout ce qui l'entourait. Elle suivait la marche, s'arrêtait quand ils s'arrêtaient, repartait quand ils se remettaient en route.
Chacun respectait son silence tout en essayant de ne pas l'exclure des conversations.
Keazou comprenait que son amie ait besoin de temps. Elle était malheureuse. Mais il espérait que ce voyage lui changerait un peu les idées, l'aidant à mieux vivre la perte de Misugi.
Keazou aimait énormément Loulou et il voulait l'aider. Il l'emmènerait avec lui partout où il irait désormais, pensa-t-il, il ne voulait plus la laisser seule.
Guitou viendrait avec eux s'il le voulait, mais Keazou n'abandonnerait pas Loulou. Sans se l'avouer vraiment, Keazou savait que c'était surtout lui qui aurait besoin de son amie dans cette aventure.